jeudi 31 janvier 2013

En souvenir de vous, Mesdames.





Elle tend vers moi sa main douloureuse, me fait un petit signe. Du couloir je lui réponds d'un grand geste du bras.
Elle est là, couchée dans son lit depuis des semaines.
Sur le côté droit face au couloir, puis deux ou trois heures après sur le côté gauche, le regard portant sur le mur de sa trop petite chambre. Plus tard on la tournera avec grand soin mais elle gémira doucement, nous rappelant combien nos gestes professionnels lui font pourtant si mal. Elle passe ainsi ses journées et ses nuits, ses semaines et maintenant ses mois.
Petit bout de femme usée, amaigrie et si fragile.
Je prends dans ma main sa main devenue osseuse, à la peau si fine et transparente que l'on voit chaque veine jusqu'à la plus petite.
De l'autre côté de la fenêtre les oiseaux semblent danser une joyeuse sarabande, mais de son lit elle ne peut rien voir de ce joli balai improvisé. Alors, je lui raconte la chorégraphie champêtre des moineaux. Elle me sourie. Je viens de faire entrer un peu de vie dans la chambre de celle qui n'arrive pas à mourir.
Elle a 100 ans. 100 ans qu'elle ne voulait pas fêter, désespérée de ne pouvoir retrouver celui qui depuis trop longtemps est parti...




par Elise